«Le football mauritanien jouit d'une image positive» : conversation avec Gérard Buscher


DTN de la Mauritanie depuis six mois, l'ancien international français (60 ans) a quitté la Tunisie, sa base de vie depuis une douzaine d'années, pour participer à une nouvelle aventure. Rencontre avec un homme totalement conquis par le football africain.

«Gérard, la dernière fois que nous avions échangé, vous étiez en Tunisie en pleine révolution de Jasmin au début des années 2010. Et vous nous aviez raconté comment vous protégiez votre quartier en érigeant une barricade avec les voisins...
Depuis, j'ai entraîné deux clubs aux Emirats, je suis revenu ensuite en Tunisie où j'ai encore dirigé le CS Hammam Lif et La Marsa. Et puis j'ai rejoint la Mauritanie en fin d'année 2020.

Pourquoi avoir accepté ce poste de DTN dans un pays africain émergeant ?

D'abord parce qu'il était vacant depuis deux ans. Il y avait donc beaucoup de choses à relancer, tant dans le football des jeunes que dans le foot féminin, la formation des jeunes, des cadres ou encore dans le futsal. Ensuite, parce que c'est une suite logique pour moi.

C'est-à-dire ?

J'ai été entraîneur de jeunes à l'OGC Nice, puis de la réserve, directeur technique, responsable de la formation puis coach de l'équipe première. J'avais un peu l'impression d'avoir fait le tour de la question en France, c'est pour cela que je suis parti en Tunisie en 2009. Et que je ne suis plus revenu en France. Je voulais voir du pays, découvrir des cultures. J'ai entraîné à l'Espérance de Tunis, à Gabès et dans d'autres clubs tunisiens. Ce pays est devenu le mien, ma famille y est installée.

«Le football mauritanien jouit d'une image positive»

Pourquoi la Mauritanie alors ?

Parce que mon ami Corentin Martins, avec lequel j'ai joué à Brest à la fin des années 1980, y est sélectionneur. Le poste et les missions qui y sont attachées me convenaient bien. Je suis viscéralement attaché à l'Afrique (NDLR : il est né à Alger), je m'y suis bien acclimaté et cette vie me va totalement. Je me régale.

Vous avez débarqué à Nouakchott juste avant que le pays n'organise la CAN U20...

Effectivement, un peu moins de deux mois avant, quand l'encadrement de la sélection a été modifié. Dans cette période, on a identifié quelques jeunes présents en France qui sont venus renforcer le groupe. Même si les jeunes Mourabitounes n'ont pas franchi le cap des poules, ils ont tout de même donné une image dynamique et positive de leur football. Cela fait déjà quelques années que le président de la FFRIM, Ahmed Yahya, a imprimé sa vision. Le football mauritanien jouit d'une image positive, celle d'une fédé structurée, je peux en témoigner.

Quelles sont vos missions du moment ?

On a relancé les compétitions de foot à huit chez les très jeunes, le Championnat des 15 ans. Je suis également responsable des sélections U15 à U20. J'ai relancé le processus de formation qui avait cessé depuis deux ans avec le départ de mon prédécesseur. Sur le plan des techniciens, on a refait du contenu, on a dispensé des diplômes CAF B et C à l'intérieur du pays. Ça m'a aussi permis de prendre la mesure des disparités d'une région à l'autre. Naturellement, je ne suis pas tout seul pour faire ça ! J'ai formé une équipe, on est quatre à la DTN. Je dispose également d'un groupe de six instructeurs. Actuellement, je travaille presque exclusivement sur le volet foot féminin. Les sélections U20 et A ont repris l'entraînement, en vue de participations aux éliminatoires de compétitions africaines.

Gérard Buscher croit beaucoup en l'évolution du football mauritanien.

«La qualification pour la CAN ? Une ambiance digne de ce que la France a connu au moment de la dernière victoire en Coupe du monde.»
Vous vous êtes engagé pour deux ans à la DTN. Vous projetez-vous sur l'avenir ?

Même si je reste Français, je n'ai aucun contact direct avec le football français. Je vis des choses exceptionnelles hors de mon pays et ça me va. Récemment, nous avons reçu les visites de plusieurs DTN africains, venus de Guinée, du Tchad et de Djibouti où le DTN est mon ami Yann Daniélou, que j'ai connu lui aussi à Brest ! Récemment, j'ai encore reçu des offres d'Algérie ou du Soudan. Mais cela ne m'intéresse pas.

Vous étiez à Nouakchott fin mars quand les Mourabitounes A se sont qualifiés pour la CAN 2021 l'an prochain au Cameroun...
Et le pays tout entier était chaud bouillant ! Une ambiance digne de ce que la France a connu au moment de la dernière victoire en Coupe du monde. Quand on se qualifie pour une deuxième phase finale de CAN d'affilée comme c'est le cas pour Coco Martins, on peut vraiment parler de travail de fond. Ce n'est pas un "one shot" sans lendemain. »

Frank Simon